Le modélisme ferroviaire est-il devenu muet ?

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Il y a quelques années déjà que je le constate, lorsque je visite des expositions ferroviaires, je suis à chaque fois fortement étonné, pour ne pas dire désappointé, par le silence quasi monacal des trains HO contemporains circulant sur les réseaux. Cette situation prive le spectateur/auditeur de ressentir l'authentique ambiance du passage des convois en mouvement, théâtralité réalisée par l'attachant martèlement, produit par le franchissement des joints de rails et des branchements, musique d'accompagnement incontournable du réel chemin de fer en activité, alors que le léger chuintement, se perdant dans son environnement, caractérise le modélisme ferroviaire contemporain.

 

Personnellement, en construisant et en exploitant un matériel roulant pratiquement inaudible, j'estime que le modélisme ferroviaire ne dispense plus le message originel qui doit, prioritairement en plus du décor, transmettre un langage, de façon à établir un véritable dialogue entre lui et son admirateur/auditeur. Cette absence d'expression, de « voix du Rail », s'explique avant tout par l'utilisation intensive de la matière synthétique dans la confection des divers éléments composant la voie et le matériel roulant du chemin de fer modèle contemporain ; or, ici, n'est-ce pas, nous parlons bien de chemin de FER et non de chemin de plastique (EISENbahn, Chemin de FER, FERROVIA et non pas PLASTIKbahn, Chemin en PLASTIQUE, PLASTICOvia).

 

Si l'on veut vraiment « rendre à César ce qui appartient à César », un retour majoritaire au métal  s'avère donc absolument indispensable.

 

Voici donc ce que je me permets de préconiser :

 

Revenir à une voie entièrement métallique du type « Märklin M », mais adaptée aux exigences d'aujourd'hui, soit utilisation d'un profil de rail plein, rails et travellage isolés par rapport au corps de la voie, alliée à une application de rayons de courbure nettement plus importants que les modestes 43,7 cm de la voie 5200 (ce rayon convenait aux voitures voyageurs ne dépassant pas une longueur de 24 cm) ; au début des années 1950, Märklin produisait deux très grands rayons pour l'époque, les fameux 3800 (rayon de 60,5 cm) et 3900 (rayon de 65,5 cm) ; en outre, les aiguillages de cette voie se présentaient dans une telle élégance à couper le souffle, qu'aujourd'hui encore, à mon avis, aucune autre voie en HO n'a atteint un tel degré de perfection et de splendeur. Cependant pour des raisons évidentes de coût (l'Europe se relevait péniblement de six années de guerre et il y avait d'autres priorités), cette magnifique voie, en avance de trente ans sur la totalité de ses concurrentes, a bien évidemment dû être abandonnée. Les années ont passé, les temps ont changé, le pouvoir d'achat s'est nettement amélioré, alors que le matériel roulant s'est considérablement allongé et nécessite donc une voie aux rayons généreux, si l'on ne veut pas présenter un train géométriquement « cassé ». Le temps est donc venu pour que la voie « M 3800-3900 » (voire encore avec des rayons plus importants) renaisse de ses cendres et brille à nouveau de ses mille feux sur les futurs chemins de fer modèles. Cette voie de jadis, grâce à la séparation entre les voies et le travellage du corps en tôle de la voie, permettait, en effet, indifféremment une exploitation en système 2 ou 3 rails, donc utilisable pour la totalité du matériel roulant HO produit à ce jour. En outre, une voie « 2 rails » de semblable facture, mais destinée au matériel roulant à écartement métrique (12 mm) serait également souhaitable.

 

Utiliser à nouveau intensivement le métal dans la confection des locomotives (caisse en métal injecté ou formée d'éléments soudés). En effet, des véhicules-moteurs lourds, équipés d'une mécanique digne de ce nom (cascade d'engrenages droits), sont les gages d'un fonctionnement sûr et durable. A ce sujet, la finesse de reproduction, bien évidemment selon les exigences actuelles et alliée au légendaire art tractionnaire de HAG, constitue, à mon avis, la meilleure technologie qui soit dans ce domaine ; en effet, les engrenages, en mouvement à l'intérieur d'une caisse métallique, produisent, grâce à l'effet de résonnance, l'incontournable musique mécanique qui sied à tout véhicule-moteur ferroviaire digne de ce nom. A titre d'exemple concret, lors de ma mise à la retraite, Goldenpass (ex MOB) m'a offert un cadeau royal, en la personne d'une Ae 8/8 BLS HAG, par la suite équipée d'un deuxième moteur de traction, ceci grâce aux compétences de Monsieur Alain Kägi d'Aigle ; lorsque je fais circuler cette machine sur ma voie « M », je suis bouleversé par son bruit de roulement, parfaitement identique à celui que j'ai à maintes fois entendu en son temps, lorsque je me trouvais sur un quai de la gare de Spiez ou de Brigue !

 

Par contre, des véhicules remorqués hybrides peuvent parfaitement convenir ; dans ce cas, la caisse est en matière synthétique (pour d'évidentes raisons de coût de fabrication), alors que le châssis et les organes de roulement demeurent cependant toujours en métal, ceci afin de garantir, d'une part, une stabilité de roulement à toute épreuve et, d'autre part, permettre, par exemple en ce qui concerne un wagon plat ou tombereau, son chargement avec du matériel lourd (pierres, ballast, ferraille, etc.), sans que cela risque d'ovaliser les boîtes d'essieux (ce qui serait par contre le cas sur un véhicule entièrement en plastique) ; cependant, en ce qui me concerne personnellement, ma préférence ira toujours en direction des voitures et wagons entièrement en métal, soit wagons marchandises en fonte injectée et voitures voyageurs en tôles finement assemblées car, sous cet aspect, le bruit de roulement s'avère d'une saisissante beauté (pa-dam-pa-dam, pa-dam-pa-dam pour les voitures voyageurs et « klong-klong-klong-klong » pour les wagons marchandises).

 

Qui dit mieux ?