En ce samedi 24 juin 2017, un train spécial, tracté par la locomotive ex SNCF 141-R 568 et formé de onze véhicules, effectua un magnifique périple valdo-fribourgeois selon le parcours suivant : Vallorbe – Lausanne – Romont – Fribourg – Payerne – Lausanne – Vallorbe, voyage circulaire qui a ainsi permis d'éviter d'effectuer un des trajets avec locomotive « à l'envers », c'est-à-dire tender en avant ce qui, esthétiquement, n'est guère séduisant.
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Cette locomotive à vapeur, ainsi que la voiture postale (toutes deux ex SNCF), magnifiquement restaurées grâce au financement d'un riche lord anglais, ont été remises contre bons soins à l'association suisse romande "Compagnie du Train à Vapeur de la Vallée de Joux"; ces deux véhicules sont soigneusement remisés dans le Dépôt des Locomotives de Vallorbe, donc à l'abri de toutes intempéries. Quant à la composition voyageurs, elle appartient à BLS-Historic et peut donc circuler sans restrictions en trafic international, car équipée de tous les agrégats nécessaires ; elle est formée d'anciennes voitures CFF du type CFF « schwere Umbau » et internationales de la série « SIG 1955 » (série produite pour les CFF, ainsi que le BLS), ainsi que d'un fourgon ex CFF de 1936 ; cette rame de dix voitures a entièrement été rénovée en son temps en Tchécoslovaquie. Quel bonheur à nul autre pareil, que d'apprécier que la Suisse romande détienne ainsi sur son territoire une grosse locomotive à vapeur européenne des plus légendaires qui soient, ayant tracté absolument tous les types de trains sur le territoire français, que ce soient de petits omnibus locaux aux express internationaux les plus emblématiques, en passant par de lourds trains de marchandises. Les puissantes 141-R (2800 CV et vitesse maximale de 105 km/h) furent produites, toutefois d'après des plans exclusivement français, aux Etats-Unis et au Canada dès la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, car la France n'était tout simplement pas en mesure de les fabriquer sur place, ceci bien évidemment en raison des nombreuses destructions issues du conflit mondial. Les 141-R ont été fabriquées à 1340 exemplaires, alors qu'hélas un bateau transporteur, chargé de ses dix-sept unités, sombra dans l'Océan Atlantique, ce qui ramena la série à 1323 machines ayant atteint le territoire français. De la fin de la guerre et jusqu'aux environs des années 1960, ces machines ont donc, par exemple, entre autres, tracté les fameux « Paris – Milan » ou vice-versa jusqu'à et de Vallorbe ; à cette époque, de Vallorbe à Domodossola, ces trains étaient remorqués par une ou un couple d'Ae 4/7 (suivant le tonnage de la composition), puis finalement par les sérénissimes E 428 sur le territoire italien.
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Par contre, je citerai deux bémols à cet ambiance du jour, soit : a) l'emploi d'un sifflet américain sur cette 141-R, alors que ces machines n'en ont JAMAIS été munies durant toute leur carrière sur la SNCF - plus de trente ans - et b) la présence d'agents en habits orange en lieu et place de la blouse bleue de jadis, mais surtout portant un vulgaire casque de chantier en plastique (donc aux antipodes de la noble et légendaire casquette plus que centenaire du cheminot suisse), image en complète contradiction avec l'époque sensée être dignement représentée par ce splendide convoi ! A ce sujet, lorsque de tels trains patrimoniaux sont affrétés, ces « petits détails » vestimentaires devraient être dorénavant pleinement respectés. En effet, à titre d'exemple, sur le Chemin de Fer-Musée Blonay – Chamby, les membres arborent tous des vêtements en parfaite harmonie avec le style de leur exploitation ferroviaire.
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Ce train spécial de onze véhicules, totalisant 400 tonnes en chiffres ronds et honoré par un grand nombre de participants, a ainsi permis à chaque ferrovipathe, profondément épris de l'histoire ferroviaire helvético-européenne, de se replonger dans l'ambiance de la première moitié du vingtième siècle, entre autres caractérisée par les irremplaçables « Grands Express Européens », qui ont sillonné de long en large les lignes les plus emblématiques de notre Vieux-Continent. Ainsi, en contemplant ce convoi, reçu sur la Voie 3 de la gare de Lausanne (la Voie du Simplon, donc tout un symbole), on ne pouvait que se remémorer les fameux « Paris – Milan », « Paris – Brindisi » ou vice-versa, etc., bien évidemment sans omettre de citer le plus sérénissime d'entre tous, le fameux « Train des Rois » ou « Roi des Trains », l'impérialissime et irremplaçable « Simplon – Orient – Express », qui partait de ou arrivait à Calais, pour atteindre Istambul (jadis Constantinople), via Paris – Vallorbe - Lausanne – Domodossola - Milan - Venise ou vice-versa.
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Bref, une mémorable et inoubliable journée patrimoniale. Et maintenant, place à quelques photographies
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"Ouvrons le bal" avec cette splendide prise de vue de Mickael Krähenbühl, réalisée entre Puidoux-Chexbres et Palézieux. Avouons que c'est tout de même "autre chose" que les actuels "avions sans ailes", "fusées sur roues", "serpents sur rails" et autres "becs de canard" !
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Ambiance "trafic international France - Italie" sur la fameuse Voie 3 de la gare de Lausanne, la légendaire
"Voie du Simplon" (tout un symbole helvético-européen). Dieu que c'est tout simplement merveilleux de revivre de tels instants bénis !
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Gros plan sur la 141-R 568. Quelle magnifique machine, qui est désormais devenue une Suissesse romande à part entière !
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En gare de Romont
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Gros plan sur la fameuse "allège postale" ex SNCF, un des véhicules les plus emblématiques de France;
seul bémol: les soufflets d'origine ont été remplacés par des tubes-gommes modernisés en caoutchouc
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Comment peut-on résister à une telle vision ferroviaire, qui n'a vraiment plus rien à voir avec le monde actuel ?